Lors d’un raisonnement "panglossien", nous triturons le contexte pour prêter des intentions aux individus, en évinçant certains facteurs de situation. Ce raisonnement "à rebours", destiné à conforter une idée que l’on souhaite établir, s'effectue alors que d’autres raisonnements sont possibles.
- Richard Monvoisin Didacticien des sciences, enseignant à l’Université de Grenoble Alpes
Le raisonnement panglossien fait que nous donnons une importance disproportionnée aux caractéristiques internes d'une personne ou d’un groupe (émotions, connaissances, opinions), en évinçant la plupart des facteurs externes ou de situation : on écrème le contexte pour prêter des intentions aux gens. Mais pourquoi notre cerveau est-il friand de ce genre d’erreur ?
La preuve par la mouche
Lorsque, par exemple, vous vous extasiez devant la fine structure d’une mouche, ou devant la beauté de l’être aimé, ou encore devant la splendeur du monde qui vous entoure, vous avez sûrement envie de vous dire que, de même que pour une jolie montre avec une horlogerie complexe, il a bien fallu un horloger ! Alors pour une aussi fine mouche, il a bien fallu un Créateur ! Le hic, c’est que si la montre avait été différente, ou si la mouche avait été conçue autrement, on dirait exactement la même chose. Derrière cette mouche, il y a des centaines, des milliers d’autres mouches différentes qui auraient pu exister à la place de la nôtre.
Lorsqu’on se plaint de la hausse des prix du foncier, ou des loyers, certains peuvent avoir l’impression d’une main invisible qui guide le marché, sans voir que, si les prix montent, c’est la somme de nos comportements qui font que lorsqu’on a un bien à vendre, on va systématiquement opter pour vendre au plus offrant. Mais on préfère prêter la hausse des prix à un "fantôme" plutôt qu’à la somme de nos petits arrangements personnels.
Le raisonnement panglossien : un bonbon pour le cerveau
Le raisonnement panglossien nous offre des solutions simples et qui expliquent tout. Et notre cerveau les adore ! Lorsqu’on raisonne sur notre carrière par exemple, on a tendance à se féliciter d’avoir choisi ce chemin, à prêter nos réussites à notre propre talent (et nos échecs à des forces extérieures), sans voir qu’il y a eu énormément de hasards dans notre histoire personnelle. Mais l’histoire que l’on se raconte est plus stimulante...
Dans cet épisode, vous pouvez faire l’expérience du raisonnement panglossien avec Richard Monvoisin, didacticien des sciences, spécialiste de l’analyse des théories étranges, qui enseigne la pensée critique à l’Université Grenoble-Alpes.
Retrouvez également Richard Monvoisin sur son blog .
Bibliographie de référence pour l’épisode 6
- Voltaire, Candide ou l'Optimisme (1759), Hatier (2015)
- Jacques-Henri Bernardin de Saint-Pierre, Étude de la nature XI (1784) Classiques Garnier (2023)
- Lee Ross, The intuitive psychologist and his shortcomings: Distortions in the attribution process, Academic Press
- Richard Monvoisin, L’univers contenait-il en germe les frères Bogdanoff ? Espèces, n°31, mars 2019
- Richard Monvoisin, Philippe Dessus, Margaux Manga, Le raisonnement Panglossien : séquence pédagogique
Une collection de podcasts en partenariat avec l'Espace des Sciences aux Champs Libres à Rennes dans le cadre de l'exposition Incroyable Cerveau et le magazine Phosphore
Un podcast en 6 épisodes de 10 minutes.
Production : Richard Monvoisin
Réalisation : Nathalie Salles
Conseillère aux programmes : Camille Renard
Chargé(e-s) de programmes : Thomas Biasci et Élodie Piel
Prise de son : Manon Houssin
Mixage : Guillaume Ledu
L'équipe
- Richard MonvoisinProduction
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- Thomas BiasciChargé(é) de programme
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