Boris Pistorius n’aura même “pas eu le temps de s’échauffer”, note la Frankfurter Allgemeine Zeitung. Nommé mardi 17 janvier, le nouveau ministre de la Défense allemand va devoir très rapidement se confronter à l’épineux dossier de la guerre en Ukraine, au moment où le pays est pressé de fournir davantage d’armes lourdes à Kiev.

Lors d’une réunion cruciale des ministres de la Défense européens prévue à Ramstein vendredi, “tous les yeux seront tournés vers lui pour savoir si l’Allemagne fournira des chars de combat Leopard ou au moins si elle permettra aux autres (États membres) de le faire”, souligne la Süddeutsche jLes alliés de l’Allemagne ont accentué mardi la pression sur le chancelier Olaf Scholz pour qu’il autorise la livraison de ces véhicules militaires.

Berlin a jusqu’à présent refusé de fournir des chars ou d’autoriser les alliés qui en disposent à le faire, affirmant que les chars occidentaux ne devraient être fournis à l’Ukraine que s’il existe un accord entre les principaux alliés de Kiev, notamment les États-Unis.

Un “homme à poigne” sans “expérience de l’international”

Quasi inconnu au niveau national, Boris Pistorius remplace Christine Lambrecht, qui a démissionné lundi après une série de bévues. Le choix de ce social-démocrate de 62 ans “a surpris la plupart des experts politiques” car il ne faisait “pas partie des favoris pour succéder à la ministre”, remarquent les journalistes de la Deutsche Welle Sabine Kinkartz et Carole Assignon. “D’un point de vue technique, la Défense est un nouveau territoire pour Boris Pistorius qui a plus d’expérience dans le secteur de la police que dans le domaine militaire”, ajoutent-elles.

Ministre de l’Intérieur de Basse-Saxe depuis 2013, Boris Pistorius est néanmoins “considéré comme un homme à poigne et un fonceur. Des qualités dont Berlin a besoin, dans un contexte de guerre en Ukraine, pour remettre sur les rails la Bundeswehr, qui se plaint d’équipements vétustes, d’avoir trop peu de munitions et d’un énorme problème d’effectifs”, estiment les deux journalistes.

L’hebdomadaire Die Zeit précise de son côté que le nouveau ministre n’a ni “une expérience de l’international ni une connaissance approfondie des sensibilités de l’armée et des problèmes d’approvisionnement de la Bundeswehr”. Jusqu’à présent, Pistorius n’a que peu “commenté les questions militaires” et s’est tenu à l’écart “du débat sur la livraison de chars à l’Ukraine”, remarque le journal allemand.

Der Spiegel rappelle toutefois que le social-démocrate a par le passé “critiqué une opinion répandue parmi les conservateurs américains selon laquelle ce qui compte, ce n’est pas seulement que l’Ukraine gagne la guerre mais que la Russie soit aussi déstabilisée”.

“Je pense que c’est dangereux, avait expliqué Boris Pistorius. Il y aura un temps après la guerre, il y aura un temps après Poutine et il faudra encore un temps où nous, en Europe, devrons nous entendre avec la Russie, sous quelque forme que ce soit.”

Des propos qui prouvent, selon le Spiegel que “le chancelier Scholz n’a pas à craindre que Pistorius ne le pousse à abandonner sa stratégie prudente” vis-à-vis de Moscou.