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Bygmalion : Nicolas Sarkozy renvoyé en procès pour financement illégal de campagne électorale

Selon l’ordonnance consultée par « Le Monde », Nicolas Sarkozy a « bénéficié des fraudes révélées par l’enquête » ; il va faire appel.

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Publié le 07 février 2017 à 09h50, modifié le 08 février 2017 à 12h26

Temps de Lecture 5 min.

En retrait de la vie politique depuis sa défaite à la primaire de la droite, Nicolas Sarkozy n’a pas fini de solder ses comptes judiciaires. Le juge d’instruction du pôle financier Serge Tournaire a signé, vendredi 3 février, l’ordonnance de renvoi devant le tribunal correctionnel dans l’affaire de ses comptes de campagnes de 2012, l’affaire dite Bygmalion.

Il demande le renvoi de l’ancien président de la République pour avoir, en tant que candidat de l’UMP à l’élection présidentielle, dépassé le plafond autorisé des dépenses de plus de 20 millions d’euros.

Outre M. Sarkozy, treize autres protagonistes, dont Bastien Millot, ancien dirigeant de la société Bygmalion, et Jérôme Lavrilleux, alors directeur adjoint de la campagne et actuellement député européen, sont renvoyés devant le tribunal notamment pour complicité d’escroquerie, usage de faux ou encore recel d’abus de confiance pour M. Lavrilleux. Une décision conforme aux réquisitions du parquet.

Cette affaire des comptes de campagne de Nicolas Sarkozy, impliquant notamment la société Bygmalion, avait vu la mise en place d’un système visant à dissimuler le dépassement du plafond légal par la minoration des dépenses déclarées, ceci par le biais d’une fausse facturation massive et l’inscription et la prise en charge par l’UMP de dépenses de campagnes.

Plusieurs niveaux de responsabilité

L’unique but de ce contournement des lois était alors de permettre au candidat de rattraper son retard dans les sondages sur François Hollande. Nicolas Sarkozy a tenu 44 meetings au total entre janvier et mai 2012, explosant de plus de 20 millions d’euros environ le plafond légal de dépenses, fixé à 22,5 millions.

Nicolas Sarkozy avait bénéficié du statut de témoin assisté pour les chefs d’usage de faux, escroquerie et abus de confiance, l’enquête n’ayant pas permis de démontrer qu’il aurait donné l’ordre de cacher certains de ses frais de campagne, ou qu’il ait été informé d’une fausse comptabilité.

Dans ce document, dont Le Monde a pris connaissance, le magistrat distingue plusieurs niveaux de responsabilité. Celles des dirigeants de Bygmalion, des cadres de l’UMP, du directeur de la campagne de Nicolas Sarkozy et enfin celle du candidat.

A son propos, le juge d’instruction écrit que « plus que quiconque, il était supposé connaître, respecter et faire appliquer par ses équipes les dispositions légales » en matière de financement de campagne.

« L’autorité de Nicolas Sarkozy, son expérience politique et l’enjeu que représentait pour lui sa nouvelle candidature à la magistrature suprême, rendent peu crédible l’hypothèse d’un candidat déconnecté de sa campagne laissant ses équipes ou son parti et ses dirigeants agir en dehors de lui et décider de tout à sa place », ajoute-t-il.

Sarkozy a « bénéficié des fraudes »

A l’issue de son instruction, le juge considère que « Nicolas Sarkozy a incontestablement bénéficié des fraudes révélées par l’enquête qui lui ont permis de disposer, lors de sa campagne de 2012, de moyens bien supérieurs à ce que la loi autorisait (…). Toutefois, l’enquête n’a pas établi qu’il les avait ordonnées, ni qu’il y avait participé, ni même qu’il en avait été informé. » C’est pour ces raisons que Nicolas Sarkozy n’est pas poursuivi pour les infractions de faux, d’escroquerie ou de recel d’abus de confiance, comme les autres mis en examen.

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Il avait en revanche été informé au moins à deux reprises du dépassement des dépenses. Dès le 7 mars 2012, soit trois semaines après l’entrée officielle en campagne, une note émanant des experts-comptables et transmise à Guillaume Lambert, alors directeur de la campagne de M. Sarkozy, alertait sur le fait que le plafond des dépenses autorisées était dépassé. Une note transmise au candidat qui décida pourtant par la suite d’accélérer sa campagne et demanda à ses équipes de tenir un meeting par jour.

Meeting de Nicolas Sarkozy à Villepinte (Seine-Saint-Denis), le 11 mars 2012.

Le juge d’instruction note ainsi que « les dérapages financiers proprement dits, qui sont distincts des manœuvres visant à les dissimuler, sont bien la conséquence directe de décisions prises par le candidat, seuls ou avec ses équipes, en toute connaissance des risques encourus ».

Il est à noter, par ailleurs, que l’ordonnance, qui vaut aujourd’hui à Nicolas Sarkozy son renvoi devant le tribunal correctionnel, n’a été signée que par le premier juge saisi, Serge Tournaire. Le second, Renaud Van Ruymbeke, a donc décidé de s’abstenir de signer le document, illustrant la guerre qui a opposé les deux magistrats tout au long de l’instruction, en désaccord notamment sur le fondement de la mise en examen de Nicolas Sarkozy.

Un détail sur lequel s’est appuyé l’avocat de M. Sarkozy, Thierry Herzog, en annonçant qu’il allait faire appel du renvoi en procès. « Ce désaccord manifeste entre ces deux magistrats, cosaisis d’une même information [judiciaire], fait rarissime pour être souligné, illustre l’inanité de cette décision », a affirmé l’avocat de l’ancien chef de l’Etat dans un communiqué.

Sous la menace de plusieurs dossiers judiciaires

Ce n’est pas le seul dossier judiciaire qui menace Nicolas Sarkozy. Il devrait ainsi être prochainement convoqué dans le cadre de l’enquête portant sur un possible financement par la Libye de Mouammar Kadhafi de sa campagne de 2007. Compte tenu des nombreux éléments accumulés par les enquêteurs au fil d’une instruction ouverte il y a plus de trois ans, la question de sa mise en examen se pose sérieusement.

Nicolas Sarkozy est par ailleurs mis en examen pour corruption active, trafic d’influence et recel de violation du secret professionnel dans l’affaire Azibert, dans laquelle il est soupçonné d’avoir cherché à obtenir des informations sur des procédures le concernant auprès du magistrat Gilbert Azibert, en échange de son aide pour obtenir un poste à Monaco.

Reste enfin l’affaire dite des sondages de l’Elysée où plusieurs de ses anciens collaborateurs sont mis en examen pour favoritisme ou complicité, comme son ancienne directrice de cabinet Emmanuelle Mignon ou l’ancien secrétaire général de l’Elysée Claude Guéant.

Au cœur de l’enquête : les contrats passés sans appel d’offres à partir de 2007 avec les sociétés de Patrick Buisson et de Pierre Giacometti, ses conseillers de l’époque, tous deux mis en examen pour recel de favoritisme. Dans cette affaire, la question de son immunité présidentielle se pose et c’est d’ailleurs l’argument qui avait été avancé par son avocat Thierry Herzog pour justifier qu’il ne se rende pas à la convocation des juges d’instruction en novembre 2016.

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