« Vous nous prenez pour des imbéciles ? » Dans sa dernière conférence TED, Al Gore, l’ancien vice-président américain, n’y est pas allé par quatre chemins pour donner son avis sur l’organisation de la prochaine Conférence des Nations unies sur le climat, la COP28, qui se tiendra à partir du 30 novembre à Abou Dhabi, aux Emirats arabes unis. Et surtout sur son président, le sultan Al-Jaber, qui est également le PDG de la compagnie nationale pétrolière.
Nommer un pétrolier à la tête d’une instance supposée programmer la fin du pétrole au nom de la lutte contre le changement climatique, c’est demander au renard d’assurer la sécurité du poulailler. Ce à quoi John Kerry, l’ambassadeur pour le climat de la Maison Blanche, répond dans le Financial Times qu’il est indispensable d’embarquer les compagnies pétrolières dans les discussions climatiques.
Eternel débat sur le rythme de la transition d’un monde carboné et en voie de réchauffement accéléré vers une planète « net zéro » en 2050, ayant enfin maîtrisé ses émissions de gaz à effet de serre.
Poursuivre les forages
On en est encore loin. Mercredi 23 août, la Namibie a confirmé que les récentes découvertes de pétrole en mer au large de ses côtes sont estimées à 11 milliards de barils, soit le plus grand gisement pétrolier jamais mis au jour en Afrique subsaharienne. Les compagnies TotalEnergies et Shell, qui ont conduit les explorations dans trois zones différentes, ont été autorisées à poursuivre les forages par 2 000 mètres de fond. Si les études confirment la faisabilité commerciale du projet, ce petit pays de 2,5 millions d’habitants pourrait, selon la société pétrolière nationale Namcor, doubler son produit intérieur brut d’ici à 2040 et donc la richesse de ses habitants.
La Namibie n’est pas seule. Tout le continent africain se rêve en magnat du pétrole. Dans le gaz, le Mozambique, la Tanzanie, le Sénégal, la Mauritanie, le Nigeria installent ou développent des installations de production et d’exportation. La vérité qui dérange, pour reprendre le titre du célèbre documentaire d’Al Gore sorti en 2006, c’est que les pays émergents n’ont aucune envie de sortir du pétrole.
Promesse hypothétique
Ces installations qui sortent de terre signifient que les compagnies pétrolières vont maintenir longtemps, bien au-delà de 2030, leurs investissements pétroliers, ne serait-ce que pour pallier la baisse de production de leurs gisements actuels. Et les européennes comme TotalEnergies, Shell ou BP sont les plus engagées dans la transition vers les énergies renouvelables. Aux Etats-Unis, Exxon et Chevron se cachent derrière la promesse hypothétique de la capture du carbone pour ne rien changer.
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